“La Conversation” Episode 1

Pour cet épisode: Guido Albertelli

La Conversation : soutenir les processus individuels et explorer comment parler des rites de passage.

©carine roth

9 septembre 2024

Après avoir pris le temps d’atterrir, de laisser se former et s’ouvrir le cercle, où les voix puissent être écoutées, une première question a fait un tour : «qu’est-ce qui te fait venir ?» Et nous avons entendu le manque de ne pas avoir eu une rencontre après la quête ; le besoin de refaire le point ; de retrouver des personnes qui ont vécu ces expériences. Nous avons entendu la difficulté de garder la connexion avec l’environnement et avec soi-même, «cet espace où je me suis senti bien». Nous avons entendu comme un besoin de témoigner, plusieurs années après, d’une expérience aussi incroyable que «franchir les limites de moi-même – un passage. Et nous avons entendu enfin qu’il était difficile de dire ce qu’on a vécu, de raconter, sans entrer dans l’intime (ce dont on n’a pas forcément envie!).


Il y a eu ensuite la suggestion que le rite de passage pourrait être quelque chose qui te permet de renouer le fil de l’histoire qui te porte, de distinguer, ou retrouver, le fil de la vie, ce qui te tient, ce à quoi tu tiens – et qui serait la nature profonde de l’intention. De là, une question pourrait être : comment cette histoire apparaît-elle à la lumière de ce que tu as expérimenté ? Comment ce qui s’est passé l’éclaire ? – «Comment vois-tu ton intention à la lumière de l’expérience et de ce qui vient après ?» Ce qui suggérait la possibilité d’écrire une «lettre d’intégration», à partager ou non – comme on demande, au départ, une «lettre d’intention».

Et tout cela a fait un tour de cercle. Où une voix a pu dire la fierté de soi-même, avec force et joie. Une autre raconter qu’après avoir fait, au long de la vie, des choses de façon un peu inconsidérée, «je ne sais pas pourquoi», elle a pu, cette fois, aller chercher la gamine, en lui apportant la conscience de l’adulte. Une autre voix encore parler de mourir à soi-même et de sortir du tombeau, et de pouvoir désormais assumer «ce que je veux» ; d’accentuer aussi le lien avec la nature. Une dernière voix tissait autour de perdre le fil et reprendre le fil ; de repartir de quelque chose de juste et vrai : la terre ; de s’émerveiller ; de pouvoir tout lâcher et prendre acte de ce qui est. En conclusion, l’une de ces voix a réuni toute cette récolte en parlant de la quête de vision comme une «quête pour la liberté».


Enfin, nous avons lu un texte sur «La nature de l’intention».

Un texte d’un guide et ami, Angelo, un des plus anciens de School of Lost Borders. Ses mots portent toute la richesse de son expérience, avec l’humble délicatesse de celui qui sait que ce n’est pas lui qui sait et son immense amour pour cette cérémonie et pour les gens qu’il y guide.

La nature de l’intention

Joseph Angelo Lazenka, traduit par Guido Albertelli

L'intention a toujours été l'un des éléments fondamentaux (bare bones) de la pratique du jeûne de vision de School of Lost Borders. Lorsque quelqu'un s'inscrit à un jeûne de vision, ou d'ailleurs à n'importe quel programme de l’école, la première chose qu'on lui demande de faire est d'écrire une lettre d'intention. La question « Quelle est mon intention ? » n'est pas posée pour définir un but ultime, un résultat ou un objectif, mais pour permettre à la question elle-même d'informer et de guider. Dans sa forme la plus simple, l'intention consiste à dire oui à ce que la vie nous demande et nous offre.

L'impulsion et la décision d'entreprendre un jeûne de vision surviennent souvent en réponse à une transition majeure de la vie. Ces moments, provoqués à la fois par des cadeaux et des pertes, nous permettent de nous entraîner à mourir à ce qui ne nous sert plus afin de donner naissance à la vie qui nous attend. La confusion et la douleur sont des manifestations naturelles de la transformation et notre «nature indigène» nous permet de comprendre, voire d'apprécier, la façon dont la vie nous façonne. Nous respirons instinctivement dans les contractions de l'accouchement et nous donnons un coup de pied, en réaction, pour briser la coquille qui laisse voir ce qui émerge. Comme la fleur qui se tourne pour faire toujours face au soleil, ou l'oiseau qui montre ses couleurs et chante sa chanson, il y a dans notre humanité une exigence de prospérer et d'offrir notre beauté.

À un moment donné de notre évolution humaine, nous avons commencé à croire que nous étions séparés de la nature et, à travers ce « mensonge de la séparation », nous avons commencé à remettre en question et à analyser les cycles naturels de notre mort et de notre renaissance. Heureusement, nous entendons encore l'appel et l'invitation, mais pour y répondre pleinement, beaucoup d'entre nous doivent affronter une peur intense du changement et se confronter à l'ombre du sentiment d’être sans valeur. David Whyte a dit un jour : « Nous sommes la seule espèce qui peut refuser sa propre floraison », et en naviguant sur notre chemin vers l'intention, nous entendons souvent en nous-mêmes : « Pourquoi moi ? Pourquoi moi ? Je ne peux pas dire oui, j'ai besoin de plus de temps, je ne suis pas assez parfait. Si je dis oui, comment cela va-t-il se passer, à quoi vais-je devoir renoncer ? Qui suis-je pour être ou faire cela ?»

La raison pour laquelle le mensonge de la séparation a fait partie de notre évolution humaine est un mystère, mais il est facile de sentir comment il a nourri notre refus et a grandement contribué à la souffrance dans notre monde. L'état de notre monde moderne et le profond chagrin que nous ressentons tous nous fissurent et nous ouvrent. Nombreux sont ceux qui, aujourd'hui, trouvent des mots et des moyens pour évoquer la réapparition de notre humanité essentielle. Dans « Un retour à l'amour », Mary Williamson a posé la question suivante : « Qui êtes-vous pas pour ne pas être ? » et dans ces quelques mots, on peut entendre une sorte d'antidote à notre mal-être, en offrant notre oui à la vie. Ils peuvent nous aider à nous souvenir et à réaliser que les dons avec lesquels nous sommes nés ne nous appartiennent pas et ne sont pas à thésauriser. La question que nous entendons aujourd'hui est la suivante : est-il trop tard ? Et la prière que nous faisons chaque jour est que cette nuit noire nous a amenés à un endroit où nous trouvons la compassion et le courage de lâcher le « grand mensonge » et de dire oui à ce qui nous est cher, ce que nous aimons.

Si c'est pour le dire une fois

Et une fois seulement, alors pourtant

Dire : Oui.


Et le dire complètement,

Le dire comme si le mot

Remplissait tout l'instant

De son dire absolu.


Plus tard pour « mais ».

Plus tard pour « si ».


Maintenant

Seulement l’unique syllabe

Qui est le bien-aimé,

Qui est le monde.


(Gregory Orr)

The nature of intent

by Joseph Angelo Lazenka

Intent has always been one of the bare bones of the School of Lost Borders’ way with the vision fast. ​ When someone signs up for a vision fast, or for that matter any of our offerings, the first thing they are asked to do is write a letter of intent. The question of: “What is my intent?” is asked not to define some ultimate purpose, outcome, or goal, but to allow the question itself to inform and guide. At its simplest, intent is saying yes to what life is asking and offering us.

The impulse and decision to undertake a vision fast often comes in response to a major life transition. Brought on by both gift and loss, these are the times we get to practice dying to what no longer serves in order to give birth to the life that awaits us. Confusion and pain are natural aspects of transformation ​and our indigenous nature carries an understanding, even appreciation for, how life shapes us. We instinctively breathe into the birthing contractions and reactively kick out to break through the shell baring our emergence. Like the flower turning to always face the sun, or a bird showing it colors and singing its song, there is in our humanness an imperative to thrive and offer our beauty.

At some point in our human evolution we began to believe that we were separate from nature, and through this “lie of separation” we began to question and analyze the natural cycles of our dying and rebirth. Fortunately we still hear “call” and invitation, but to respond fully many of us have to turn into an intense fear of change and face the shadow of unworthiness. David Whyte once said, “We are the only species that can refuse our own flowering”, and in navigating our way to intent we often hear in ourselves: Why me? I can’t say yes, I need more time, I’m not perfect enough. If I say yes, how will it come about, what will I have to give up? Who I’m to be or do this?

It is a mystery why the lie of separation became a part of our human evolution, but easy to feel how it has fed our refusal, and added greatly to the suffering in our world. ​The state of our modern world, and the deep grief that we all are feeling, is cracking us open. Many are now finding words for, and ways to point to, a re-emerging knowing of our essential humanness. In “A Return to Love” Mary Williamson asked “Who are you not to be?” and in these few words one can hear a kind of antidote to our dis-ease, with offering our yes to life. They can help us to remember and realize ​that the gifts that we are born with are not ours nor ours to horde. The question we are now hearing is: Is it too late? And the prayer we live each day is that this dark night has brought us to a place where we are finding the compassion and the courage of heart to let go of the “great lie” and say yes to the beloved.​

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