RAJE 2024 - des nouvelles du programme de “Rise and Regenerate and Rite de Passage”
Rite de Passage en partenariat avec Activate! et Les Coccinelles
En août 2024, un groupe de jeunes adultes venus du monde entier s'est réuni en Suisse pour participer à l'échange international de jeunesse
« Rise and Regenerate – Rite of Passage »
Cet événement, une initiative locale de dix jours destinée à cultiver le leadership et l’activisme chez des jeunes internationaux, a été organisé grâce aux efforts conjoints des organisations suisses Les Coccinelles et Rite de Passage, ainsi que de l’organisation sud-africaine ACTIVATE!
Il a également bénéficié du soutien financier de Movetia, une fondation qui promeut les échanges, la mobilité et la coopération dans les domaines de l'éducation et de la formation auprès des jeunes, en Suisse, en Europe et à l'échelle mondiale.
Élever des Ponts : La Jeunesse Face aux Inégalités Globales
Pour les participants sud-africains, ce n’était pas qu’une simple opportunité de voyager : c’était une expérience de changement. Représentant leurs townships et villages, leur voyage incarnait une source d'espoir et de fierté pour leurs communautés restées au pays.
Pour Obohle « Baby » Sihu, une jeune femme issue d’un village rural en Afrique du Sud, cette opportunité allait bien au-delà d’un projet personnel. Toute sa communauté voyait en son voyage une opportunité puissante de mettre leur village sur la carte et de montrer au monde leur richesse et leur potentiel. De nombreux jeunes de sa région aspirent à de grandes choses malgré des opportunités limitées, et ce voyage représentait une preuve inspirante que leurs rêves peuvent les mener loin. Pour son village, c'était une façon affirmée de dire au monde : « Nous sommes ici, et nous comptons. »
Une rencontre de cultures
Cette rencontre de cultures était tout aussi importante pour les participants du Nord global, comme ceux venant de Suisse, d’Italie et d’Allemagne. De telles expériences offrent une rare opportunité aux jeunes issus de milieux privilégiés d’interagir directement avec les réalités vécues par ceux des régions historiquement marginalisées. Ces échanges suscitent des conversations essentielles sur le racisme systémique, les héritages coloniaux et la nécessité de décoloniser non seulement les systèmes mondiaux mais aussi les mentalités individuelles. Ils remettent en question des biais profondément enracinés, aidant les participants du Nord global à confronter et commencer à démanteler les structures de privilège dont ils bénéficient souvent inconsciemment.
Une réalité brutale
Cependant, tandis que l’événement visait à bâtir des ponts, le processus de visa a révélé à quel point il est difficile pour les jeunes du Sud global d’accéder à des opportunités dans le Nord global. Une réalité dure et cruelle.
Pour les jeunes participants sud-africains sélectionnés, ce voyage était leur première expérience à l’étranger. Activistes travaillant à l’échelle locale pour résoudre les problèmes de leurs communautés, souvent sans emploi formel ni soutien financier substantiel, ils avaient malgré tout obtenu un financement complet pour ce déplacement de la part d’une fondation Suisse. Mais leurs demandes de visa ont rencontré des obstacles. Le processus exigeait des preuves de stabilité financière, un critère injustement lié au privilège. Cela s’est avéré être une barrière majeure, les faisant se sentir davantage comme des suspects que comme des invités.
En raison de ces restrictions et exigences, les participants sud-africains sélectionnés n’ont pas pu participer à l’échange et se rendre en Suisse. Sur six participants, seuls deux ont obtenu leur visa. Baby, accompagnée de Shoki Abiguele Chuene, Keagen Jeron Gertse, et Massegow Gorgy Machwisa, ont vu leur demande refusée.
Ce refus n’a pas été qu’une déception personnelle : il était profondément injuste, soulignant combien il est difficile pour les jeunes issus de milieux moins favorisés du Sud global de participer à des événements internationaux dans le Nord global, quelle que soit leur qualification ou leur mérite. Plus douloureusement, le poids émotionnel a été lourd. Beaucoup de participants se sont sentis découragés, remettant en question leur valeur personnelle malgré le fait que le problème résidait dans le système, et non en eux.
Un paradoxe troublant
D’un côté, l’institution suisse Movetia offre un soutien financier et logistique pour des projets comme « Rise and Regenerate – Rite of Passage », promouvant les échanges interculturels et la coopération internationale. De l’autre, l’Ambassade de Suisse en Afrique du Sud empêche les jeunes de participer à des initiatives officiellement soutenues par les autorités suisses.
Dans ce cas précis, Movetia a entièrement financé notre projet d’échange international, même si quatre participants sud-africains n’ont pas pu y assister en raison du refus de leur visa.
Bien que nous soyons reconnaissants pour l’engagement de Movetia, il est difficile de comprendre pourquoi deux institutions du même pays, Movetia et l’ambassade suisse, ne parviennent pas à collaborer efficacement, sapant ainsi les objectifs mêmes que ces projets sont censés atteindre.
Leur absence a été ressentie
L’absence de Baby, Shoki, Keagen et Massegow a brisé le cœur de tous les participants à l’échange. Dès le premier jour, le groupe a tenu une cérémonie symbolique pour inclure ces jeunes en esprit et honorer leurs histoires. La résilience de Baby et l’espoir qu’elle portait pour sa communauté ont inspiré tous les présents.
Pour les rapprocher, les participants ont organisé une soirée dansante et ont invité les quatre jeunes à se joindre en ligne. Bien que cela ne puisse remplacer leur présence physique, c’était une manière de rappeler à tous qu’ils faisaient toujours partie de l’aventure.
Cependant, même participer en ligne n’a pas été une mince affaire, leurs communautés étant régulièrement confrontées à des coupures de courant, une réalité très présente et réelle dans de nombreuses régions d’Afrique. Cela est d’autant plus frustrant que le continent regorge de ressources naturelles nécessaires à la production d’énergie, mais beaucoup de ces ressources sont extraites et exportées pour profiter au Nord global, laissant les populations locales lutter pour satisfaire leurs besoins énergétiques de base.
Un appel au changement
L’échange « Rise and Regenerate » a montré à quel point les connexions globales peuvent être puissantes, mais il a également révélé à quel point le terrain reste inégal. Pour que des événements comme celui-ci atteignent pleinement leur objectif, les institutions et gouvernements doivent abandonner des processus de visa empreints d'arrogance et d'injustice, en concevant des systèmes qui reconnaissent le potentiel des individus au lieu de juger leur valeur sur la base de leur compte en banque. Il est temps de briser cette présomption systématique et humiliante selon laquelle venir d’un pays du Sud global signifie forcément vouloir demander asile dans un pays comme la Suisse.
En abaissant ces barrières, nous pouvons garantir que les jeunes activistes, quel que soit leur lieu d’origine, aient la chance de faire entendre leur voix et de grandir. Il ne s’agit pas seulement d’ouvrir des portes, il s’agit de bâtir un monde de rencontres et de relations, où les opportunités sont réellement accessibles à tous. Des événements comme celui-ci prouvent ce qui est possible lorsque l’inclusion est au cœur de la collaboration à nous toustes de faire de cette vision une réalité.